• Ils semblent accueillir de façon distante. Tout d’abord, un premier, bicolore sur fond roux, niche sur la branche la plus basse du premier arbre de l’allée verdoyante et fleurie, bordée d'arbres pensifs, scrute le passant, questionne silencieusement l’invitée qui s’aventure à franchir le long chemin menant à sa maison que garde un saule resplendissant près d'un puits enlierré, couvert d’un voile aux transparences du temps.

     

    Désir de s’imprégner des couleurs et parfums de tout ce qui entoure, envoûte ce vieux corps de ferme, comme on dit, situé juste à la sortie du village.

     

    Désir de retrouver l’être qui m’attend à l’ombre de tous les vacarmes de la vie.

     

    Tiens ! un second au regard vert me fixe du fond d’une brouette aussi vieille que nos ancêtres. Bien sûr qu’il est noir et qui le sait. Il m’évince, peut-être me déshabille… C’est quoi son pouvoir ? Avoir de l’ascendant, sans jamais rien dire, sur les silhouettes multiformes, visiteurs d'un instant,  qui arrivent chez lui.

     

    Donner un contenu mystérieux à l’atmosphère tandis que je me dirige vers la porte principale rustique, grinçante mais réconfortante.

     

    Désir de franchir le seuil enrosé de rouge de vie, de jaune soleil et blanc de vierge, fleurs ouvertes et généreuses, suspendues au gré du mur fissuré, fatigué, consentant.

     

    Désir de m’approcher de l’être qui m'attend, qui m’entend du fond de son fauteuil avachi mais si complice de ses humeurs.

     

    Tout est ouvert. Dans l’entrée, près d’un vase longiligne en grès bleu patiné, son bouquet de lavandes et brins de blé séchés… Quoi ? Un troisième rayé gris, tout petit, malicieux et joueur ! Je souris malgré l’aspect sinistre de ce couloir encombré de portraits photographiés, d’aquarelles jolies, de troubles miroirs dépareillés.

     

    Les dalles sont usées des pas de toute une existence. Et j’avance en ralentissant mon cœur qui s’emballait juste avant dans le train de ma mémoire.

     

    Non ! Un quatrième ! Certes je ne connais pas leurs noms et ne vis pas avec des chats. Mais j’ai l’impression d’être entrée dans un monde étrange où ces félins me toisent sans même me frôler. Ils ne me reconnaissent pas depuis le début de ma venue, dès l’orée de la maison de mon amie. Celui-là aussi a deux couleurs qui tranchent ; noir et blanc. Je l’aurais bien appelé Dé. C’est lui qui, perché sur un escabeau fleuri, sans même bouger, m’intimidant comme une enfant ; c’est lui qui m’indique qu’elle est là.

     

    Sur ses genoux, le dernier, un chaton blanc comme son visage attendri.

     

    Elle me donne, je lui prends ses mains d’amie de toutes mes vies.

     

    Suzâme

    (28/04/11)


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  • m503501 d0116712-000 p

    Théodore Caruelle d'Aligny

    2ème quart 19è siècle

    réf. 8221, recto

    Site : http://www.culture.gouv.fr/

     

    Là, devant moi, c’est un arbre qu’on torture puis décapite.

     

    Douleur du réel lorsque la distance n’éloigne pas les êtres qui souffrent.

     

    L’un, d’entendre la mort scier ses bras d’existence, son tronc, ultime corps assassiné et...

    l’autre, victime des vertiges de son impuissance et du simple amour de la vie.

     

    Suzâme

    (25/04/11)


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  • (Pensées pour Emilia)

     

    Son âme n’a pas d’âge

    Elle me l’a dit et s’en amuse.

    Son âme n’a pas d’âge

    Elle le vit et nous ruse.

     

    Suzâme

    (25/04/11)

     

    N.B. J’ai eu la chance d’accepter ce cadeau, un petit papier qu’elle m’a donné fugacement lors d’une brève rencontre sur le chemin de nos existences.

     

     

    « Nul ne comprend que mon âme n’a pas d’âge, pas même le temps ! Et puis comment l’expliquer à la famille, aux médecins, mais surtout à mon corps ? Mon âme découvre encore, s’étonne, apprend. Oh et puis qui peut savoir d’après ma vieille allure inclinée sur l’infini que j’aime autant la vie, QUE JE VEUX VIVRE TOUJOURS !... »

     

    Emilia

    Extrait de son journal «Mon temps indéfini» inédit


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  • «- tu expérimentes le silence!» lui hurle son acolyte assis à ses côtés sur une crique oubliée.

     

    Sans réponse que celle des vagues insoumises, il renonce à lui parler et fait alors appel à l'océan qui s'en mêle fièrement :

     

    «Eh poète! Même les coquillages murmurent! Ne perd pas ta vie! Ne perd pas ton temps! Le silence est pour le ciel."

     

    Suzâme

    (22/04/11)


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  • « - Combien de noeuds pour faire un seul silence ? eh vous là-bas, au fond de la classe ? Rémi, je vous parle et vous engage à répondre enfin! »

     

    L'élève semble rêver. La tête en appui sur ses deux mains repliées comme des poings. Dans l'impossibilité de répondre à l'enseignante impatiente, il ne parlera pas et n'avouera donc pas qu'il pense présentement à son enfance sur un banc d'école indifférent.

     

    Comme d'habitude, il ne dira rien non plus à ses copains. Bien sûr qu'il rêve sauf que cela lui fait mal comme un secret aussi simple qu'une petite arète dans sa gorge d'enfant qui mène au coeur.

     

    Suzâme

    (22/04/11)


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